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Chimène Denneulin / Les carrés noirs colorent nos vies
Chimène Denneulin
Les carrés noirs colorent nos vies

Le titre de cette exposition est un collage entre deux évènements qui ont eu lieu à plus d'un siècle d'écart.
Premièrement,Malévitch.
En 1915 à Saint Petersbourg, Kasimir Malevitch montre son premier carré noir dans l' "Exposition O.lO" qu'il organise. D'autres formes, noires ou de couleurs vives, sont également présentes dans l'ensemble de 39 tableaux qu'il expose. Plus tard, lorsqu'il enseignera à Vitebsk, il incitera ses étudiants à faire de la ville le support de leurs expériences artistiques, affiches, murs peints, tramways ... s'orneront de ces formes simples : des carrés noirs comme outils visuels qui symbolisent un monde nouveau.
Ensuite, une banderole. Celle déployée par les participants au Black bloc lors de la manifestation du 1er mai
2018 : "Le black bloc colore nos vies". Que veut dire cette phrase ? Il faut avoir vécu à Nantes ou à Rennes pour
appréhender ce que fut un phénomène massif (il s'est vu également à Paris ou dans d'autres villes mais dans une
moindre mesure) : des litres de peinture de couleur projetés sur les façades des banques, des bâtiments institutionnels (Mairie), sur les murs de la ville, dans un geste de révolte anti-capitaliste.
Les formes utilisées pour cette exposition sont directement empruntées au répertoire de Malévitch. Si j'ai utilisé des formes similaires auparavant, ici la citation est directe.
Avec les tableaux présentés ici, je cherche une mise en tension, un dialogue entre photographie et peinture abstraite.
Aussi, cette opération de collage, de masquage apparent ou de montage, travaille le regard : entre informations (de la photographie) et poésie visuelle (de la peinture), on passe de l'un à l'autre tout en sachant que l'un et l'autre s'échangent aussi leurs rôles.
Chimène Denneulin

 

Chimène Denneulin prend des photographies qu'elle imprime sur toile puis elle peint une figure géométrique
colorée sur une partie centrale de la photographie. On aperçoit seulement sur les côtés de l'image peinte des
parcelles de la prise de vue initiale.
Il y a une photographie «réaliste» et une volonté de modifier cette photographie. Cela semble une critique de
l'image comme si celle-ci ne représentait pas. Ce qui offre un accès direct à la réalité est aussi un leurre car la photographie fige pour l'éternité une personne dans une pose idéalisée ou idiote, c'est un aphorisme du sujet photographié, rarement décrit dans sa complexité.
Retravailler la photographie, c'est questionner le support, c'est effectuer une modification poétique et politique sur le sujet en lui apportant un supplément formel.
Chimène Denneulin sonde l'image en la masquant, comme d'autres la fragilise par la pixellisation. Elle analyse et en tire une couleur unie, une dominante.
Le surplus d'images qui nous envahit à chaque instant est censé nous donner une vision globale et parfaite du réel comme si l'habit faisait le moine.
Mais l'on ne s'assoit pas sur l'image d'une chaise et l'on ne se marie pas avec l'image d'une femme. Ce que l'on croit voir n'est pas, c'est un reflet que l'on peut compléter en y apportant une vision subjective affirmée, notamment par la poésie. Celle-ci effleure une certaine réalité de l'être en mouvement, une prise de position personnelle face au réel qui lui donne un champ des possibles, une suréalité qui ouvre l'accès à l'inconscient, à ce qui se cache derrière des façades sublimées ou abîmées.
En ce sens, les couleurs ajoutées par Chimène Denneulin pourraient êtres les couleurs intimes du sujet photographié au delà de sa figuration, comme lorsque l'on passe au scanner un cerveau : des taches colorées apparaissent et montre son activité, ses problèmes de circulation, ses oedèmes ; bien plus qu'une photographie de profil. L'artiste opère donc une seconde révélation qui est celle de la critique et de l'interprétation de l'image révélée de prime abord, elle la repasse au bac de peinture et rend l'oeuvre géométrique, architecturale et colorée. Chimène Denneulin classe et sensibilise une seconde fois l'image imprimée et en affirmant son intime conviction, elle évoque l'asymétrie possible entre ce qui se montre et ce qui se cache au-delà des temps de pose.
Laurent Quénéhen

en Images

APONIA
67, rue Saint Pierre
43150 Le Monastier sur Gazeille

06 20 49 36 90

Contact : aponia@wanadoo.fr
www.aponia.fr
 

Vendredi, samedi et dimanche de 15h à 18h (en Période d'exposition)
Sur RDV pour les groupes scolaires également les autres jours

L'église Saint Jean et le 67, rue Saint Pierre sont accessibles
aux personnes à mobilité réduite

Entrée libre et gratuite